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CFRIES
16 septembre 2006

La petite Transnistrie vote pour rejoindre Moscou

Fabrice Nodé-Langlois .

Publié le 16 septembre 2006

Actualisé le 16 septembre 2006 : 21h26

Cette région séparatiste doit décider dimanche d'adhérer à la Russie, distante de 600 km.

«SOUVENONS-NOUS. Nous ne sommes pas la Moldavie.» Ces slogans, illustrés par des photos de la guerre de 1992, couvrent tous les murs de Tiraspol. Un conflit qui fit 812 morts côté Transnistrie. La région russophone qui craignait alors que la Moldavie indépendante ne l'entraîne dans une grande Roumanie, fut soutenue par Moscou et sortit vainqueur de la guerre.

Dimanche, environ 400 000 électeurs de la République moldave de Transnistrie (PMR, en russe), ce ruban de terre de 45 km de large et 450 km de long, coincé entre Moldavie et Ukraine, doivent participer à leur sixième référendum. Question principale : «Soutenez-vous la politique d'indépendance de la République moldave de Transnistrie et sa future adhésion volontaire à la Fédération de Russie ?»

Ce minuscule territoire, séparé de la Russie par 600 km, est dirigé d'une main de fer depuis seize ans par Igor Smirnov. On le dit ancien du KGB, mais les faits ne sont pas établis. De l'URSS, l'homme aux sourcils broussailleux, à la moustache et au bouc qui évoquent Lénine, a conservé la faucille et le marteau comme emblème national.

Mercredi, le recteur de l'université de Tiraspol avait rassemblé dans un amphithéâtre environ 500 étudiants pour les exhorter «à faire leur devoir de citoyen». Dans les rues ensoleillées de la «capitale» aux allures de bourgade soviétique de province, la campagne pour le non est inexistante. Pour les chancelleries occidentales, ce référendum est une «farce».

Trafics en tout genre

La propagande et les pressions ne suffisent cependant pas à expliquer l'unanimité «prorusse». Les raisons de l'attrait pour la «grande Russie», comme l'appelle le président Smirnov, sont moins ethniques ou linguistiques qu'économiques. Tout le monde ici a des parents à Chisinau (Moldavie) ou à Odessa (Ukraine), à une heure de route, et sort du «pays» sans grande difficulté.

Le «blocus» du printemps dernier a exacerbé le sentiment national. Le 1er mars 2006, l'Ukraine et la Moldavie, en application d'un accord douanier, ont cessé d'importer les marchandises de Transnistrie qui ne portaient pas de tampon moldave. Tiraspol avait refusé d'enregistrer ses sociétés en Moldavie, provoquant une crise économique. Depuis, commerce oblige, les entreprises transnistriennes se sont enregistrées et les petites boutiques comme les supermarchés bleu-blanc-rouge du sulfureux groupe Shérif (qui possède stations essence, club de foot et télévision) sont aujourd'hui bien achalandés.

La reprise du commerce légal n'a pas pour autant mis un terme aux soupçons de trafics en tout genre qui collent à la Transnistrie depuis quinze ans. Ses frontières sont des passoires et les douanes, dirigées par un des fils du président, Vladimir, encaissent des droits. Pour des marchandises qui sont ensuite clandestinement revendues... en Ukraine.

Une économie soutenue par la Russie

Outre les trafics, l'économie est soutenue massivement par Moscou. Selon le débonnaire «ministre des Affaires étrangères» Valéri Litskaï, la Russie qui soutient le rouble local, a injecté 55 millions de dollars cette année pour payer les retraites et soutenir les usines en difficulté. En contrepartie, des entreprises russes prennent le contrôle des fleurons de ce qui était le poumon industriel de la très rurale Moldavie.

«Nous ne pourrons résoudre le conflit en se fondant sur la nationalité ou la religion», assure Dmitri Soïne. Ce jeune homme élégant de 37 ans, cheveux attachés en catogan, est le charismatique idéologue du mouvement de jeunesse Proriv, par ailleurs directeur de la chaire locale de sociologie. Dmitri reçoit en offrant du thé vert dans le bureau de «l'école Che-Guevara» de Proriv, sur la place centrale de Tiraspol. Derrière lui, des jeunes sur fond de musique techno surfent sur Internet et préparent les prochaines manifestations de ce mouvement prorusse. Le même Dmitri Soïne se cache à peine d'être officier du MGB, le tout-puissant KGB local. Les autorités moldaves l'accusent de meurtres et, selon une enquête journalistique, il serait impliqué dans le trafic d'armes. Des accusations qu'il balaie d'un sourire, en prêchant démocratie et tolérance. Une tolérance à la mode de Tiraspol : dans son local trône un mannequin représentant l'ennemi, le président de la Moldavie, Vladimir Voronine, vêtu de noir, en officier SS.

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