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CFRIES
25 août 2007

ANALYSE : La stratégie russe au Fonds monétaire international

En proposant la candidature du Tchèque Josef Tosovsky à la présidence du FMI contre celle du Français Dominique Strauss-Kahn, Moscou veut bousculer les règles du jeu d'une institution dépendante de Bruxelles et Washington, assure Vremia Novostieï.

L'information selon laquelle la Russie souhaitait proposer son propre candidat à la direction du Fonds monétaire international (FMI) a reçu hier une confirmation officielle. Mercredi [22 août] matin, le ministère des Finances russe a annoncé qu'Alexeï Mojine, représentant de la Russie au conseil d'administration du FMI, désirait voir le Tchèque Josef Tosovsky en devenir le prochain directeur. "Nous estimons que M. Tosovsky serait la bonne personne au bon endroit au bon moment", pouvait-on lire dans le communiqué du ministère.

Cet homme, qui dirige depuis sept ans l'Institut de stabilité financière auprès de la Banque des règlements internationaux, à Bâle [Suisse], devient ainsi le second candidat déclaré. Le premier, le Français Dominique Strauss-Kahn, présenté par le président de son pays, est soutenu par les ministres des Finances de l'Union européenne. Il parcourt le monde depuis plusieurs semaines afin de séduire les gouvernements de différents pays, émergents en  particulier.

De nombreux Etats actionnaires du FMI avaient beau être mécontents de la façon dont se déroulait l'élection du futur directeur, l'initiative de Moscou a fait l'effet d'un coup de tonnerre. Pourquoi personne ne s'est décidé avant à faire ce qu'ont fait les responsables russes ? La réponse est simple : l'UE et les Etats-Unis sont liés par des accords sur le soutien à M. Strauss-Kahn, et tous les autres pays, même ceux qui auraient eu un candidat de valeur à proposer, ont baissé les bras, désespérant de voir triompher un candidat en concurrence avec celui soutenu à la fois par l'Europe et l'Amérique.

Dans cette affaire la Russie avait, elle, les mains libres. Libre de toute obligation envers le FMI et voyant le processus électoral dans
l'impasse, Moscou a avancé une solution en parfaite adéquation avec les intérêts du Fonds. Il s'agit sans conteste d'une nouvelle attitude de sa part sur la scène internationale. Est-elle justifiée ? Les premiers commentaires étrangers [européens] se sont bornés à dire que Moscou voulait diviser l'Union européenne et utilisait désormais le domaine économique, après avoir employé l'argument énergétique et la lutte contre le bouclier antimissile américain. C'est évidemment exagéré : la solution choisie est trop complexe pour la soupçonner de viser pareil objectif. En réalité, la Russie a agi comme un actionnaire adulte et responsable du FMI, un actionnaire qui a une vision réaliste des problèmes de cette organisation et de l'ampleur des tâches qui l'attendent.

Alexeï Koudrine, le ministre des Finances, russe les définit assez précisément. Pour lui, le Fonds devrait savoir prévenir les crises. "Je pense à 1998 [année où la Russie a connu une grave crise financière]. Le FMI a été incapable d'aider la Russie à anticiper la crise", a-t-il déclaré, en soulignant qu'à l'époque la Russie n'avait pas été la seule à subir l'inefficacité du Fonds. Il existe certes des crises qu'aucune institution, même très puissante et performante, n'est en mesure de contrôler. Mais l'ennui, c'est que, depuis, l'autorité du FMI sur le plan mondial, qui est l'une des conditions de son efficacité, n'a cessé de diminuer. Une raison, et non des moindres, réside dans la procédure d'élection du directeur, qui aboutit à de mauvais choix.

Cette fois, lorsque l'Espagnol Rodrigo de Rato a annoncé son départ anticipé (en octobre 2007, alors qu'il aurait dû rester en place jusqu'en 2009), des voix se sont élevées pour affirmer qu'il était temps d'abandonner la tradition qui veut que le Fonds soit invariablement dirigé par un Européen. La rapidité avec laquelle le nouveau président français, Nicolas Sarkozy, a imposé la candidature de M. Strauss-Kahn lui a assuré une longueur d'avance et même, a-t-on pu croire, garanti la victoire. Mais la Russie est venue brouiller les cartes.

Andreï Denissov
Vremia Novostieï

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