Retour au pays des soviets [partie3]

Source : Radio Canada

Moldavie, le plongeon dans le tiers-monde

La Moldavie illustre l'immense défi de la désorganisation économique et politique qui a suivi l'effondrement de l'URSS. Situé entre la Roumanie et l'Ukraine, ce petit pays de 4 millions d'habitants, essentiellement tourné vers l'agriculture, compte 80 % de sa population dans la pauvreté.

Avant 1940, la plus grande partie de la Moldavie était rattachée à la Roumanie. Quand Michel Labrecque s'y est rendu en 1991, le pays venait tout juste de déclarer son indépendance. La majorité roumaine reprenait alors ses droits après avoir été russifiée et soviétisée pendant plus de 50 ans.

Toutefois, depuis la chute de l'empire communiste, l‘économie de cette ancienne république soviétique s'est littéralement effondrée. Le paysage verdoyant et vallonné demeure magnifique, mais les routes sont boueuses et cabossées.

Des champs autrefois gérés par les fermes collectives sont laissés en friche, tandis que l'eau courante, autrefois universelle, a disparu. Les écoles sont rongées par la vermine, les décors sont vétustes. La soif d'apprendre et d'enseigner se conjugue avec une énorme misère matérielle.

Les enseignants rencontrés par Michel Labrecque gagnent environ 100 $US par mois pour enseigner - un salaire comparable à celui d'un ouvrier chinois dans une manufacture - ce qui nécessite un revenu d'appoint.

L'argent de la diaspora

Les Moldaves doivent aussi leur salut à l'exil. Dans les villages, de nombreux enfants n'ont plus de parents à la maison: près du quart de la population adulte est partie travailler dans des pays plus riches pour permettre à ceux qui restent de subsister.

La corruption continue de faire des ravages, les investissements étrangers tardent à venir. En outre, plusieurs réformes en matière de justice et de droits fondamentaux sont encore imparfaites. Néanmoins, selon les élus, le cauchemar tire à sa fin, après 15 ans marqués par une guerre civile et des restructurations économiques pénibles.

Après des années de valse-hésitation entre l'est et l'ouest, les élites politiques du pays ont pris résolument un virage pro-occidental. Avec l'entrée attendue de la Roumanie dans l'Union européenne en 2007, la Moldavie se retrouve à la nouvelle frontière entre l'Europe et la zone d'influence russe. Le gouvernement moldave a lancé un vaste plan d'action pour adapter ses lois aux critères et aux valeurs européennes, avec l'espoir caché de rejoindre l'UE un jour.

Malgré les énormes problèmes du pays, une nouvelle Moldavie émerge lentement à Chisinau, capitale et métropole de 700 000 habitants. La grisaille soviétique a cédé la place à de nombreux restos-terrasses, les bars à cappuccinos côtoient les boutiques de designers. De grands panneaux publicitaires annoncent de nouveaux lotissements résidentiels pour classe moyenne.

Paradoxalement, c'est un gouvernement aujourd'hui dirigé par le Parti communiste qui mène ce virage vers l'ouest. Un parti autrefois assez favorable à la Russie, avant que Moscou ne lui tourne le dos à la suite de différends politiques.

Cette attitude contre Moscou a cependant un prix: l'ancien grand frère bloque les exportations agricoles et viticoles de la Moldavie, pourtant un grand fournisseur à l'époque soviétique.